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LES GUEUX.


XIV

GOULATROMBA. — LE DUC.
Une rue déserte
Entre le duc, vieux et cassé, suivi de deux robustes laquais. Il aperçoit Goulatromba.


LE DUC.

Ah ! c’est toi, drôle ?

Aux laquais.

Ah ! c’est toi, drôle ? Holà, vous autres !

Il s’avance, menaçant, sur Goulatromba.

Ah ! c’est toi, drôle ? Holà, vous autres ! Tu vas dire
Tout ce que tu sais, toi !

GOULATROMBA.

Tout ce que tu sais, toi ! Duc, je vous veux du bien.
La violence est laide et c’est un sot moyen.

LE DUC.

Nous allons voir !

GOULATROMBA.

Nous allons voir ! Tenez, l’autre jour, vous triplâtes
Les coups sur mon échine et sur mes omoplates,
Vous me fîtes rosser, de la nuque aux talons,
Par six laquais taillés comme des Apollons.
Eh bien, ai-je parlé ? Nullement. Vous n’obtîntes
De moi que des mots froids, confus, des demi-teintes.
De révélations, point. Des faits mal liés ;
Fort peu de jour enfin sur ce que vous vouliez.
Laissons le bâton, fi ! Parlons en gentilshommes.
Honorons, vous et moi, les maisons dont nous sommes.
Duc, je vais vous donner des avis obligeants.
Pour faire, comme il sied, jaser d’honnêtes gens,
Rien n’est tel qu’un écu. L’écu qui sonne et brille
Fait qu’un bègue bavarde et qu’un poisson babille,