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saisissant sa hache.
Ah ! tu sors du sépulcre ! eh bien ! je t'y repousse,
Afin qu'au même instant,— tu comprends, Barberousse,
Où le monde entendra cent voix avec transport
Crier : Il est vivant ! l'écho dise : il est mort !
— Tremble donc, insensé qui menaçais nos tètes !
Les burgraves, l'épée haute, pressent Barberousse avec des cris formidables. Job sort, de la foule et lève la main. Tous se taisent.

Job, à l'empereur.
Sire, mon fils Magnus vous a dit vrai. Vous êtes
Mon ennemi. C'est moi qui, soldat irrité,
Jadis portai la main sur Votre Majesté.
Je vous hais. — Mais je veux une Allemagne au monde.
Mon pays plie et penche en une ombre profonde.
Sauvez-le. Moi, je tombe à genoux en ce lieu
Devant mon empereur que ramène mon Dieu !
Il s'agenouille devant Barberousse, puis se tourne à demi vers les princes et les burgraves.
A genoux tous ! — Jetez à terre vos épées !
Tous jettent leurs épées et se prosternent, excepté Magnus. Job, à genoux, parle à l'empereur.
Vous êtes nécessaire aux nations frappées ;
Vous seul! Sans vous l'Etat touche aux derniers moments,
Il est en Allemagne encor deux Allemands :
Vous et moi. — vous et moi, cela suffira, sire.
Régnez.
Désignant du geste les assistants.
Quant à ceux-ci, je les ai laissés dire,
Excusez-les, ce sont des jeunes gens.
A Magnus, qui est resté debout.
Magnus!
Magnus, en proie à une sombre irrésolution, semble hésiter. Son père fait en geste. Il tombe à genoux.
Job poursuit.
Toujours barons et serfs, fronts casqués et pieds nus,
Chasseurs et laboureurs ont échangé des haines ;
Les montagnes toujours ont fait la guerre aux plaines,
Vous le savez. Pourtant, j'en conviens sans effort,
Les barons ont mal fait, les montagnes ont tort !
Se relevant. Aux soldats.
Qu'on mette en liberté les captifs.
Les soldats obéissent en silence et détachent les chaînes des prisonniers, qui, pendant cette scène, sont venus se grouper dans la galerie au fond du théâtre.