Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome III.djvu/23

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


PREMIÈRE JOURNÉE

L’HOMME DU PEUPLE


Le bord de la Tamise. Une grève déserte. Un vieux parapet en ruine cache le bord de l’eau. À droite, une maison de pauvre apparence. À l’angle de cette maison, une statuette de la Vierge, aux pieds de laquelle une étoupe brûle dans un treillis de fer. Au fond, au delà de la Tamise, Londres. On distingue deux hauts édifices, la Tour de Londres et Westminster. — Le jour commence à baisser.


Scène PREMIÈRE.

Plusieurs hommes groupés çà et là sur la grève, parmi lesquels SIMON RENARD, JOHN BRIDGES, baron CHANDOS, ROBERT CLINTON, baron CLINTON, ANTHONY BROWN, vicomte DE MONTAGU.
LORD CHANDOS.

Vous avez raison, milord. Il faut que ce damné Italien ait ensorcelé la reine. La reine ne peut plus se passer de lui. Elle ne vit que par lui, elle n’a de joie qu’en lui, elle n’écoute que lui. Si elle est un jour sans le voir, ses yeux deviennent languissants, comme du temps où elle aimait le cardinal Polus, vous savez ?

SIMON RENARD.

Très amoureuse, c’est vrai, et par conséquent très jalouse.

LORD CHANDOS.

L’Italien l’a ensorcelée !

LORD MONTAGU.

Au fait, on dit que ceux de sa nation ont des philtres pour cela.

LORD CLINTON.

Les Espagnols sont habiles aux poisons qui font mourir, les Italiens aux poisons qui font aimer.

LORD CHANDOS.

Le Fabiani alors est tout à la fois espagnol et italien. La reine est amoureuse et malade. Il lui a fait boire des deux.