Écouter l’instinct, satisfaire l’appétit ; sagesse. L’idéal héroïque s’est déplacé ; c’était Léonidas, c’est Pantagruel. Tout est un ventre.
Et j’ajoute ceci : — Tout étant matière, plus de loi morale. Le tyran est comme le tigre, un innocent.
Voilà ce qu’a gagné la démocratie.
Oh ! cramponnons-nous au vrai.
Le peuple ne vit pas de négation, mais d’affirmation.
La démocratie veut croire. Croire, c’est pouvoir.
La liberté veut la responsabilité ; l’égalité veut l’azur, la fraternité humaine a pour source la paternité divine.
Il y a une sorte de proverbe populaire qui fait de Peuple et de Dieu les deux termes d’une équation.
Il n’y a pas de roi parce qu’il y a un Dieu ; toute monarchie est une usurpation de providence. Pourquoi ? Parce que tout ce qui n’est pas l’auteur est sans droit à l’autorité. De là l’inanité du Chef de Peuple et la majesté du Père de Famille.
Ces dernières lignes réclament peut-être quelque approfondissement.
La démocratie humaine est visiblement la volonté de l’auteur suprême.
Il ne crée de royauté que là où le libre arbitre n’existe point, dans les espèces inférieures ; et alors quand il veut déléguer l’autorité, voici comment il s’y prend :
Regardez cette nation. Elle en vaut la peine. Elle a une ville, la ruche, et un travail, le miel. Cette nation s’appelle les abeilles.
Cette nation est une monarchie. Elle a une reine.
La Reine est une abeille aussi, mais pas la même abeille que les autres. Elle éclôt dans une alvéole d’une forme différente. Elle est de plus grande taille ; elle a l’abdomen plus large, la tête moins grosse, le corselet plus svelte, les ailes plus courtes ; elle n’a pas les brosses du travail aux pattes et le sac à miel sous le ventre. Son aiguillon est courbe au lieu d’être droit. Les sujettes vivent à peine un an ; la reine vit quatre ans au moins, quelquefois sept ans. Les autres sont grises, elle seule est dorée. Elle ne travaille pas.
Quelle est sa fonction ?
Elle pond son peuple.
En outre, elle chante. Et quand elle chante, toute la ruche se tait.