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voûte pleine d’enrichissements bien coupés. Au-dessus vous pouvez voir le clocher très délicatement percé. Il y a aussi un jardin plaisant, qui consiste en un étang, une volière, un écho, un mail, un labyrinthe, une maison pour les bêtes farouches, et quantité d’allées touffues fort agréables à Vénus. Il y a encore un coquin d’arbre qu’on appelle le luxurieux, pour avoir servi aux plaisirs d’une princesse fameuse et d’un connétable de France galant et bel esprit. — Hélas ! nous autres pauvres philosophes nous sommes à un connétable ce qu’un carré de choux et de radis est au jardin du Louvre. Qu’importe après tout ? La vie humaine pour les grands comme pour nous est mêlée de bien et de mal. La douleur est toujours à côté de la joie, le spondée auprès du dactyle. — Mon maître, il faut que je vous conte cette histoire du logis Barbeau. Cela finit d’une façon tragique. C’était en 1319, sous le règne de Philippe V, le plus long des rois de France. La moralité de l’histoire est que les tentations de la chair sont pernicieuses et malignes. N’appuyons pas trop le regard sur la femme du voisin, si chatouilleux que nos sens soient à sa beauté. La fornication est une pensée fort libertine. L’adultère est une curiosité de la volupté d’autrui… — Ohé ! voilà que le bruit redouble là-bas !

Le tumulte en effet croissait autour de Notre-Dame. Ils écoutèrent. On entendait assez clairement des cris de victoire. Tout à coup, cent flambeaux qui faisaient étinceler des casques d’hommes d’armes se répandirent sur l’église à toutes les hauteurs, sur les tours, sur les galeries, sous les arcs-boutants. Ces flambeaux semblaient chercher quelque chose ; et bientôt ces clameurs éloignées arrivèrent distinctement jusqu’aux fugitifs : — L’égyptienne ! la sorcière ! à mort l’égyptienne !

La malheureuse laissa tomber sa tête sur ses mains, et l’inconnu se mit à ramer avec furie vers le bord. Cependant notre philosophe réfléchissait. Il pressait la chèvre dans ses bras, et s’éloignait tout doucement de la bohémienne, qui se serrait de plus en plus contre lui, comme au seul asile qui lui restât.

Il est certain que Gringoire était dans une cruelle perplexité. Il songeait que la chèvre aussi, d’après la législation existante, serait pendue si elle était reprise, que ce serait grand dommage, la pauvre Djali ! qu’il avait trop de deux condamnées ainsi accrochées après lui, qu’enfin son compagnon ne demandait pas mieux que de se charger de l’égyptienne. Il se livrait entre ses pensées un violent combat, dans lequel, comme le Jupiter de l’Iliade, il pesait tour à tour l’égyptienne et la chèvre ; et il les regardait l’une après l’autre, avec des yeux humides de larmes, en disant entre ses dents : — Je ne puis pas pourtant vous sauver toutes deux.

Une secousse les avertit enfin que le bateau abordait. Le brouhaha sinistre