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grosseur du livre. Le manuscrit est un peu

plus de la moitié de celui de Bug-Jargal, que j’ai conservé. Il y aura, au contraire, un fort volume in-12.

Je vous dirai en terminant, Monsieur, et sans, du reste, vous en faire un reproche, que la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire est la première de ce genre que je reçois. Jusqu’ici — et c’est à regret que je suis forcé de rappeler cela — les libraires, de ma main, avaient pris sans lire. Je ne leur ai jamais ouï-dire qu’ils s’en fussent mal trouvés. J’espère qu’il en sera de même de vous, car je ne crois pas avoir rien fait qui ait plus de chance de vente, et d’autres que moi sont de cet avis. Si cette lettre m’était venue de tout autre, je ne vous cache pas que je n’y eusse point répondu, mais j’ai voulu vous donner ces explications à vous, monsieur, comme une marque spéciale d’estime et de cordial attachement.

V. Hugo.

P. S. La gravure est très bien. L’édition in-18 des Orientales me paraît imprimée en un caractère bien fin et peu beau. Je voudrais bien causer de tout cela avec vous, ainsi que du prospectus… Il importe de mettre vite le Condamné sous presse, si vous voulez qu’il paraisse avant la Chambre, ce qui est de la plus haute importance.

V. H.

Le volume parut le 7 février 1829, sans nom d’auteur en tête des premières éditions. Victor Hugo s’était borné à le faire précéder de quelques lignes. Naturellement on se livra à la recherche de la paternité, nombre de suppositions furent mises en avant, les uns dirent : c’est un livre anglais, les autres affirmèrent qu’il était américain. Victor Hugo publia dans la troisième édition une préface dialoguée : Une Comédie à propos d’une Tragédie et, dès la cinquième édition, une longue préface datée du 15 mars 1832, qui contenait une énergique profession de foi contre la peine de mort ; il disait alors que ce livre n’était ni anglais, ni américain, qu’il en avait pris l’idée sur la place de Grève. Il l’avait signé cette fois et avait fait avec Renduel le traité dont nous avons déjà parlé.

Nous avons retrouvé dans le dossier inédit intitulé : Tas de pierres, cette note :

DERNIER JOUR
D’UN CONDAMNÉ.

But du Dernier Jour d’un Condamné : inspirer aux classes élevées l’horreur, aux classes inférieures la terreur de la peine de mort.

(1er avril 1832.)

On ne saurait feuilleter un volume de Victor Hugo, vers ou prose, sans y rencontrer des pages contre la peine de mort. N’est-ce pas dans Han d’Islande, le premier roman publié, que la curiosité de la foule pour les exécutions est énergiquement flétrie (chapitre lxviii) ? Et soixante ans plus tard, Victor Hugo n’implorera-t-il pas la clémence de la reine d’Angleterre pour un condamné à mort[1] ?

Le Dernier Jour d’un Condamné est la véritable préface dramatique de tous ses plaidoyers en faveur d’une cause dont il devait être et rester l’avocat ardent et convaincu.

  1. Condamnation de O’Donnel, 14 décembre 1883.