Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome I.djvu/281

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le petit homme avait disparu.

Il y avait déjà quelque temps que les montagnards se sentaient succomber sous le nombre ; car aux arquebusiers de Munckholm s’étaient joints les tirailleurs de la forêt, et des détachements de hulans et de dragons démontés, qui arrivaient de moment en moment de l’intérieur des gorges, où la reddition des principaux chefs rebelles avait arrêté le carnage. Le brave Kennybol, blessé au commencement de l’action, avait été fait prisonnier. La capture de Han d’Islande acheva d’abattre tout le reste du courage des montagnards. Ils mirent bas les armes.

Quand les premières blancheurs de l’aube éclairèrent la cime aiguë des hauts glaciers encore à demi submergés dans l’ombre, il n’y avait plus dans les défilés du Pilier-Noir qu’un morne repos, qu’un affreux silence parfois entremêlé de faibles plaintes dont se jouait le vent léger du matin. De noires nuées de corbeaux accouraient vers ces fatales gorges de tous les points du ciel ; et quelques pauvres chevriers, ayant passé pendant le crépuscule sur la lisière des rochers, revinrent effrayés dans leurs cabanes, affirmant qu’ils avaient vu, dans le défilé du Pilier-Noir, une bête à face humaine, qui buvait du sang, assise sur des monceaux de morts.