Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome I.djvu/262

Cette page a été validée par deux contributeurs.

XXXVII


caupolican.
xxxxMarchez avec tant de précaution que la terre elle-même n’entende pas le bruit de vos pas… Redoublez de soins, mes amis… Si nous arrivons sans être entendus, je vous réponds de la victoire
tucapel.
xxxxLa nuit a tout couvert de ses voiles ; une obscurité effrayante enveloppe la terre. Nous n’entendons aucune sentinelle, nous n’avons point aperçu d’espions.
ringo.
xxxxAvançons !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

tucapel.
xxxxQu’entends-je ? serions-nous découverts ?
Lope de Vega, l’Arauque dompté.



— Dis-moi, Guldon Stayper, mon vieux camarade, sais-tu que la bise du soir commence à me rabattre vigoureusement les poils de mon bonnet sur le visage ?

C’était Kennybol, qui, détachant un moment son regard du géant qui marchait en tête des révoltés, s’était tourné à demi vers l’un des montagnards que le hasard d’une course désordonnée avait placé près de lui.

Celui-ci secoua la tête, et changea d’épaule la bannière qu’il portait, avec un grand soupir de lassitude.

— Hum ! je crois, notre capitaine, que dans ces maudites gorges du Pilier-Noir, où le vent se précipite comme un torrent, nous n’aurons pas tout à fait aussi chaud cette nuit qu’une flamme qui danse sur la braise.

— Il faudra faire de tels feux que les vieilles chouettes en soient éveillées au haut des rochers, dans leurs palais de ruines. Je n’aime pas les chouettes ; dans cette horrible nuit où j’ai vu la fée Ubfem, elle avait la forme d’une chouette.

— Par saint Sylvestre ! interrompit Guldon Stayper en détournant la tête, l’ange du vent nous donne de furieux coups d’ailes ! — Si l’on m’en croit, capitaine Kennybol, on mettra le feu à tous les sapins d’une montagne. D’ailleurs ce sera une belle chose à voir qu’une armée se chauffant avec une forêt.