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Hélas! le doute injuste est au fond de son coeur
Comme au fond d'un beau vase une amère. liqueur.
C'est qu'elle a tant gémi dans ,ces lugubres. voies
Où Dieu nous pousse avec nos douleurs et nos joies!
Une larme éternelle erre au bord de ses yeux...
Oh! courbons-nous devant ces fronts mystérieux
Qui, faibles et ployés, dans l'ombre où Dieu nous jette,
Semblent faits pour porter la souffrance muette,
Que le destin poursuit, ce bourreau jamais las,
Que tous les maux sur terre et tous les deuils, hélas!
Couvrent de leur cilice, accablent de leurs voiles,
Et qu'attendent aux cieux des couronnes d'étoiles!

Aime-la! porte-lui ton coeur chaque matin,
Ris! Réjouis cette âme à ton rire enfantin.
Sois le flot pur qui porte et caresse le cygne.
Quand elle parle, adore; obéis sur un, signe.
Sois son consolateur et sois son défenseur.
Que le mensonge vil, trompé dans sa noirceur,
Vienne apportant l'affront, te voie, et le remporte.
Qu'on te sente déjà veillant devant. sa porte.
Si le sort m'eût donné, sainte et charmante loi,
Ce grand devoir de fils qu'il te confie à toi,
Oh! comme elle eût dormi sous ma garde fidèle,
Et, lion pour autrui, j'eusse été chien pour elle!

Sois bon, spis doux, sois tendre. Écarte de ta main,
Sous ses pieds délicats, les pierres du chemin.

Pour elle, ô pauvre enfant, tu donnerais, écoute,
Ton âme souffle à souffle et ton sang goutte à goutte,
De sa robe à genoux tu baiserais les plis,
Tu la contemplerais comme on contemple un lys,
Comme on contemple un ciel où se lève l'aurore,
Mains jointes,l'oeil en pleurs, ce ne serait encore,
Pour cet être au front pur à qui tu dois le jour,
Pas assez de respect et pas, assez d'amour!