Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIII.djvu/356

Cette page n’a pas encore été corrigée


Il s'en fait conducteur; il sait le droit chemin;
Il veut qu'après l'émeute et les grands coups de main,
Le peuple se repente, ait l'âme d'ennui pleine,
Pleure, et de la Bastille aille à la Madeleine.
Toute la vérité tient dans le Syllabus.
La pensée en dehôrs d'Ignace est un abus,
Et tout ce qui survient n'est qu'erreurs et tumultes;
Debout au marchepied de l'omnibus des cultes,
Barrant la porte, il crie à tout venant: Complet!
Falstaff, dont le menton si gaîment se triplait,
Est dévot. Que sert-il? la messe. Il s'associe
Au dogme, et ses hoquets sentent l'orthodoxie;
Il coud un psaume au bout de son ancien couplet;
Une âme libre ouvrant ses ailes lui déplaît;
Montant la garde autour du missel, ce gros homme
Prêche, et son ventre prend fait et cause pour Rome;
Il dit qu'il ne faut pas laisser sans examen
L'homme communiquer avec l'esprit humain,
Qu'il est bon de tout craindre, et, de peur d'aventure,
De garder l'Éternel derrière une clôture;
Il croit; son estomac s'accouple au sacré-coeur;
Au seuil noir du mystère il s'installe vainqueur,
Prêt à barricader le gouffre avec sa table;
Il consacre au seul culte auguste et véritable
Ce qui reste à ses pieds des bons vins qu'il a bus;
Il emploie à servir les Jéhovahs fourbus
Et les religions mortes ou corrompues,
Tout l'arsenal cassé de ses franches repues;
Il n'entend pas qu'on aille à travers le ciel bleu,
L'ombre immense, en dehors du pape, chercher Dieu;
Il refuse aux penseurs l'air, l'horizon, l'espace,
Plantant, pour empêcher que l'esprit humain passe
Au-delà de la bulle In Caena Domini,
Tous ses culs de bouteille au mur de l'infini.

24 juin 1870.

XVIII Ô sombre femme,