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XV Un grand sabre



Un grand sabre serait d'utilité publique:
Est-ce qu'il n'est pas temps d'exterminer la clique
Des songeurs, des rêveurs, des penseurs, des savants,
Et de tous ces semeurs jetant leur graine aux vents,
Et de mettre au pavois celui qui nous fait taire,
Et de souffler sur l'aube, et d'éteindre Voltaire!
Qu'attendez-vous ? Oh! comme il serait beau de voir
Quelque bon vieux tyran faire enfin son devoir,
Couper, tailler, trancher et mettre à vos Molières,
A vos Dantes, à vos Miltons, des muselières!
Nous en avons assez de tous ces bavards-là.
Le mal des hommes vient du premier qui parla.
0n va criant: Progrès! Fraternité! Couragè!
Quel besoin avons-nous de tous ces mots d'orage?
Jadis tout allait bien pourvu qu'on,se tînt coi.
On veut être à présent libre et maître. Pourquoi?
Liberté, c'est tempête. Il faut qu'un bon pilote
Ramène au port, la barque et le peuple à ,l'ilote.
Il faut qu'un belluaire ou qu'un homme d'état
Bride, ce peuple osant commettre l'attentat
De naître, et s'égarant jusqu'à la convoitise
Que montre au lys l'abeille et la chèvre au cytise.
Les révolutions continueront, le bruit
Et le vacarme iront grossissant dans la nuit,
 
Tant que nous n'aurons pas trouvé ce politique.
Reprenons l'ancien temple et l'ancienne boutique;
Revivre le passé nous suffit. Que veut-on?
A quoi sert Diderot? à quoi rime Danton?