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VARIANTES ET VERS INÉDITS


Page 46.

La torche aux Rhamséions, aux Schœnbrunns, aux Versailles !
Non ! assez de malheur, de meurtre et de ravages !
Qu’Ossa soit à son tour broyé par Pélion !
Assez d’égorgements ! assez de deuil ! assez
Au bourreau les bourreaux ! Justice ! talion ![1]
De fantômes sans tête et d’affreux trépassés !

Le progrès épousant la mort se prostitue.
S’agit-il d’égorger ? Peuples, il s’agit d’être.
Tu veux tuer quelqu’un ? qui donc ? Celui qui tue.
Quoi ! tu veux te venger, passant ? de qui ? du maître ?


Page 47.

Que l’homme est solidaire avec ses monstres même,
Que toujours le supplice éclabousse le ciel,
Qu’une tête qui tombe éclabousse le ciel,
Et qu’il ne peut tuer autre chose qu’Abel !
Et qu’il ne peut tuer autre chose qu’Abel !
Lorsqu’une tête tombe, on sent trembler le ciel.


Page 48.

C’est toujours une nuit fatale
C’est toujours une nuit funeste au peuple entier
Que celle où, le livide et morne guichetier,
Que celle où, conduisant un prêtre, un guichetier
Après avoir reçu le prêtre et la voiture,
Fouille au trousseau de clefs qui pend à sa ceinture
Fouille au trousseau de clefs qui pend à sa ceinture
Pour aller, sur le lit de fièvre et de torture,
Pour aller réveiller un
Réveiller avant l’heure un pauvre homme endormi,
Tandis qu’en un lieu sombre,
Tandis que sur la Grève, entrevus à demi,
Sous les coups de marteau clouant les pieux qui tremblent
Sous les coups de marteau qui font fuir la chouette,
D’effrayants madriers se dressent et s’assemblent,
D’effrayants madriers dressent leur silhouette…


Page 49.

La fin de tout espoir, la mort de toute foi…
Le néant, le remords, l’ignorance ou l’effroi…

Au-delà des rumeurs, des jours, des lendemains,
Au delà d’aujourd’hui, de demain, des saisons,
Et du vain flamboiement des horizons humains
Des jours, du flamboiement de nos vains horizons…

Puisque vous ne savez rien de vous, rien du sort,
Puisque vous ne voyez rien de clair dans le sort…

Serez-vous donc meilleurs
Quel pas aurez-vous fait pour avoir ajouté…


Page 50.

En avant ! Du progrès reculons les frontières.
Non, l’élargissement des mornes cimetières

  1. Ces quatre vers, formant variante dans cette pièce, se retrouvent dans un manuscrit publié sous le titre : La Guillotine (Toute la Lyre).