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III

L’ARRIVÉE.




Oh ! les mornes chevaux, comme ils allaient, farouches !
Nul souffle ne sortait de leurs fatales bouches,
Nul regard n’étoilait la noirceur de leurs yeux.
À mesure que, froids, sourds et silencieux,
Ils entraient plus avant dans la grande nuit triste,
L’infini, qui, muet, aux prodiges assiste,
Épaississait la brume au fond de l’horizon ;
Et les arbres, troublés d’un sépulcral frisson,
Tordaient leurs bras souffrants et leurs branches meurtries,
Tandis que cheminaient le long des Tuileries,
Toujours du même pas vertigineux et lent,
Les deux cavaliers noirs et le cavalier blanc.

Devant eux, comme un cap où les flots se déchirent,
L’angle de la terrasse apparut ; ils franchirent
Ce pas sombre, et le bruit cessa sur les pavés,
Et l’ombre fit silence ; ils étaient arrivés.

L’eau du fleuve fuyait, d’obscurité couverte.



Ô terreur ! au milieu de la place déserte,
Au lieu de la statue, au point même où leurs yeux