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LE PAPE.

Pas d’ornement grossier, pas de matières viles ;
Quand Salomon disait aux bâtisseurs de villes :
― Bâtissez sur la roche et non sur le limon ―
Hiram, maçon du temple, écoutait Salomon ;
Donc obéissez-moi. Faites un fier mélange
Du Raphaël pudique et du grand Michel-Ange ;
Peignez sur la muraille Adam qu’Ève tenta,
Moïse au Sinaï, Jésus au Golgotha,
Les Géants terrassés malgré leur haute taille,
Job, et l’effarement des chevaux de bataille ;
Tout ce qui foudroya, tout ce qui rayonna,
Festin de Balthasar et noces de Cana,
Doit faire flamboyer et resplendir les fresques ;
Mariez l’arc lombard aux ogives moresques ;
Que la statue alterne avec les noirs tableaux ;
Une église doit être un large espace, enclos
De bons murs, préservé des vents et des tempêtes ;
Prêtres, emplissez-la de fleurs les jours de fêtes ;
Tout ce qui vient du ciel, l’église le contient ;
Un roi qui la voudrait orner comme il convient,
Épuiserait Golconde et n’y pourrait suffire ;
Prodiguez-y l’airain, le jaspe et le porphyre
Que n’atteint pas la rouille et né mord pas le ver.

LE PAPE

Et mettez-y des lits pour les pauvres l’hiver.