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LES RAYONS ET LES OMBRES.


Pourvu qu’il sente, esclave ou libre,
Tenant à tous par un côté,
Vibrer en lui par quelque fibre
L’universelle humanité ;

Courage ! — Dans l’ombre et l’écume
Le but apparaîtra bientôt !
Le genre humain dans une brume,
C’est l’énigme et non pas le mot !

Assez de nuit et de tempête
A passé sur vos fronts penchés.
Levez les yeux ! levez la tête !
La lumière est là-haut ! marchez !





Peuples ! écoutez le poëte !
Écoutez le rêveur sacré !
Dans votre nuit, sans lui complète,
Lui seul a le front éclairé.
Des temps futurs perçant les ombres,
Lui seul distingue en leurs flancs sombres
Le germe qui n’est pas éclos.
Homme, il est doux comme une femme.
Dieu parle à voix basse à son âme
Comme aux forêts et comme aux flots.

C’est lui qui, malgré les épines,
L’envie et la dérision,
Marche, courbé dans vos ruines,
Ramassant la tradition.
De la tradition féconde
Sort tout ce qui couvre le monde,
Tout ce que le ciel peut bénir.