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Et les hommes alors se sont avec envie
Penchés pour voir dedans !

Avec des cris de joie ils ont compté tes plaies
Et compté tes douleurs,
Comme sur une pierre on compte des monnaies
Dans l’antre des voleurs.

Ta chaste renommée, aux exemples utiles,
N’a plus rien qui reluit,
Sillonnée en tous sens par les hideux reptiles
Qui viennent dans la nuit.

Eclairée à la flamme, à toute heure visible,
De ton nom rayonnant,
Au bord du grand chemin, ta vie est une cible
Offerte à tout venant

Où cent flèches, toujours sifflant dans la nuit noire,
S’enfoncent tour à tour,
Chacun cherchant ton cœur, l’un visant à ta gloire
Et l’autre à ton amour !

Ta réputation, dont souvent nous nous sommes
Ecriés en rêvant,
Se disperse et s’en va dans les discours des hommes,
Comme un feuillage au vent !

Ton âme, qu’autrefois on prenait pour arbitre
Du droit et du devoir,
Est comme une taverne où chacun à la vitre
Vient regarder le soir,

Afin d’y voir à table une orgie aux chants grêles,
Au propos triste et vain,
Qui renverse à grand bruit les cœurs pleins de querelles
Et les brocs pleins de vin !