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Chacun, c’est la loi suprême,
Rame, hélas ! jusqu’à la fin.
Pas d’homme, ô fatal problème !
Qui ne laboure ou ne sème
Sur quelque chose de vain !

L’homme est sur un flot qui gronde.
L’ouragan tord son manteau.
Il rame en la nuit profonde,
Et l’espoir s’en va dans l’onde
Par les fentes du bateau.

Sa voile que le vent troue
Se déchire à tout moment,
De sa route l’eau se joue,
Les obstacles sur sa proue
Ecument incessamment !

Hélas ! hélas ! tout travaille
Sous tes yeux, ô Jéhova !
De quelque côté qu’on aille,
Partout un flot qui tressaille,
Partout un homme qui va !

Où vas-tu ? — Vers la nuit noire.
Où vas-tu ? — Vers le grand jour.
Toi ! — Je cherche s’il faut croire.
Et toi ? — Je vais à la gloire.
Et toi ? — Je vais à l’amour.

Vous allez tous à la tombe !
Vous allez à l’inconnu !
Aigle, vautour, ou colombe,
Vous allez où tout retombe
Et d’où rien n’est revenu !