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I

À l'Arc de Triomphe


Toi dont la courbe au loin, par le couchant dorée,
S’emplit d’azur céleste, arche démesurée ;
Toi qui lèves si haut ton front large et serein,
Fait pour changer sous lui la campagne en abîme,
Et pour servir de base à quelque aigle sublime
Qui viendra s’y poser et qui sera d’airain !

Ô vaste entassement ciselé par l’histoire !
Monceau de pierre assis sur un monceau de gloire !
Édifice inouï !
Toi que l’homme par qui notre siècle commence,
De loin, dans les rayons de l’avenir immense,
Voyait, tout ébloui !

Non, tu n’es pas fini quoique tu sois superbe !
Non ! puisque aucun passant, dans l’ombre assis sur l’herbe,
Tandis que triviale, errante et vagabonde,
Entre tes quatre pieds toute la ville abonde
Comme une fourmilière aux pieds d’un éléphant !

À ta beauté royale il manque quelque chose.
Les siècles vont venir pour ton apothéose
Qui te l’apporteront.
Il manque sur ta tête un sombre amas d’années
Qui pendent pêle-mêle et toutes ruinées
Aux brèches de ton front !