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Jeter sur ce vieillard cassé par la misère
Qui dort sous le fardeau de la terre étrangère !

Roi, puissant, vous l’avez brisé ; c’est un grand pas.
Il faut l’épargner mort. Et moi, je ne crois pas
Qu’il soit digne du peuple en qui Dieu se reflète
De joindre au bras qui tue une main qui soufflette.

X


Nous, pasteurs des esprits, qui, du bord du chemin,
Regardons tous les pas que fait le genre humain,
Poëtes, par nos chants, penseur, par nos idées,
Hâtons vers la raison les âmes attardées !
Hâtons l’ère où viendront s’unir d’un nœud loyal
Le travail populaire et le labeur royal,
Où colère et puissance auront fait leur divorce,
Où tous ceux qui sont forts auront peur de leur force,
Et d’un sain tremblement frémiront à la fois,
Rois, devant leurs devoirs, peuples, devant leurs droits !
Aidons tous ces grands faits que le Seigneur envoie
Pour ouvrir une route ou pour clore une voie,
Les révolutions dont la surface bout,
Les changements soudains qui font vaciller tout,
A dégager du fond des nuages de l’âme,
A poser au-dessus des lois comme une flamme
Ce sentiment profond en nous tous replié
Que l’homme appelle doute et la femme pitié !
Expliquons au profit de la sainte clémence
Ces hauts évènements où l’état recommence,
Et qui font, quand l’œil va des vaincus aux vainqueurs,
Trembler la certitude humaine au fond des cœurs !
Faisons venir bientôt l’heure où l’on pourra dire
Que sur le froid sépulcre on ne doit rien écrire
Hors des mots de pardon, d’espérance et de paix ;