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IV

Elles parlaient tout haut et vous parliez tout bas
— « Dieu qui m’avez fait naître,
» Vous m’avez réservée ici pour des combats
» Dont je tremble, ô mon maître !

» Ayez pitié ! — L’esquif où chancellent mes pas
» Est sans voile et sans rames.
» Comme pour les enfants, pourquoi n’avez-vous pas
» Des anges pour les femmes ?

» Je sais que tous nos jours ne sont rien, Dieu tonnant,
» Devant vos jours sans nombre.
» Vous seul êtes réel, palpable et rayonnant ;
» Tout le reste est de l’ombre.

» Je le sais. Mais cette ombre où nos cœurs sont flottants,
» J’y demande ma route.
» Quelqu’un répondra-t-il ? Je prie, et puis j’attends !
» J’appelle, et puis j’écoute !

» Nul ne vient. Seulement par instants, sous mes pas,
» Je sens d’affreuses trames.
» Comme pour les enfants, pourquoi n’avez-vous pas
» Des anges pour les femmes ?

» Seigneur ! autour de moi, ni le foyer joyeux,
» Ni la famille douce,
» Ni l’orgueilleux palais qui touche presque aux cieux,
» Ni le nid dans la mousse,

» Ni le fanal pieux qui montre le chemin,
» Ni pitié, ni tendresse,