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Pour visiter mon âme ont monté de la rue,
Et de quelque couteau se faisant un burin,
Sans respect pour le verbe " écrit sur son airain,
Toutes, mêlant ensemble injure, erreur, blasphême,
L’ont rayée en tous sens comme ton bronze même,
Où le nom du Seigneur, ce nom grand et sacré,
N’est pas plus illisible et plus défiguré !


                         III

Mais qu’importe à la cloche et qu’importe à mon âme !
Qu’à son heure, à son jour, l’esprit saint les réclame,
Les touche l’une et l’autre et leur dise : chantez !
Soudain, par toute voie et de tous les côtés,
De leur sein ébranlé, rempli d’ombres obscures,
A travers leur surface, à travers leurs souillures,
Et la cendre et la rouille, amas injurieux,
Quelque chose de grand s’épandra dans les cieux !
Ce sera l’hosanna de toute créature !
Ta pensée, ô Seigneur ! ta parole, ô nature !
Oui, ce qui sortira, par sanglots, par éclairs,
Comme l’eau du glacier, comme le vent des mers,
Comme le jour à flots des urnes de l’aurore,
Ce qu’on verra jaillir, et puis jaillir encore,
Du clocher toujours droit, du front toujours debout,
Ce sera l’harmonie immense qui dit tout !
Tout ! les soupirs du cœur, les élans de la foule ;
Le cri de ce qui monte et de ce qui s’écroule ;
Le discours de chaque homme à chaque passion
L’adieu qu’en s’en allant chante l’illusion ;
L’espoir éteint ; la barque échouée à la grève ;
La femme qui regrette et la vierge qui rêve ;
La vertu qui se fait de ce que le malheur
A de plus douloureux, hélas ! et de meilleur ;