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thies l’inspireront, on peut en juger, si l’on en est curieux, par la pièce XL du livre que nous mettons au jour. Cependant, dans la position indépendante, désintéressée et laborieuse où l’auteur a voulu rester, dégagé de toute haine comme de toute reconnaissance politique, ne devant rien à aucun de ceux qui sont puissants aujourd’hui, prêt à se laisser reprendre tout ce qu’on aurait pu lui laisser par indifférence ou par oubli, il croit avoir le droit de dire d’avance que ses vers seront ceux d’un homme honnête, simple et sérieux, qui veut toute liberté, toute amélioration, tout progrès, et en même temps toute précaution, tout ménagement et toute mesure ; qui n’a plus, il est vrai, la même opinion qu’il y a dix ans sur ces choses variables qui constituent les questions politiques, mais qui, dans ses changements de conviction, s’est toujours laissé conseiller par sa conscience, jamais par son intérêt. Il répétera en outre ici ce qu’il a déjà dit ailleurs[1] et ce qu’il ne se lassera jamais de dire et de prouver : que, quelle que soit sa partialité passionnée pour les peuples dans l’immense querelle qui s’agite au dix-neuvième siècle entre eux et les rois, jamais il n’oubliera quelles ont été les opinions, les crédulités, et même les erreurs de sa première jeunesse. Il n’attendra jamais qu’on lui rappelle qu’il a été, à dix-sept ans, stuartiste, jacobite et cavalier ; qu’il a presque aimé la Vendée avant la France ; que si son père a été un des premiers volontaires de la grande république, sa mère, pauvre fille de quinze ans, en fuite à travers le Bocage, a été une brigande, comme madame de Bonchamp et madame de Larochejaquelein. Il n’insultera pas la race tombée, parce qu’il est de ceux qui ont eu foi en elle et qui, chacun pour sa part et selon son importance, avaient cru pouvoir répondre d’elle à la France. D’ailleurs, quelles que soient les fautes, quels que

  1. Préface de Marion de Lorme.