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Ce qu’un Napoléon peut laisser de poussière
Dans le creux de la main !

O merveille ! ô néant ! — tenir cette dépouille !
Compter et mesurer ces os que de sa rouille
Rongea le flot marin,
Ce genou qui jamais n’a ployé sous la crainte,
Ce pouce de géant dont tu portes l’empreinte
Partout sur ton airain !

Contempler le bras fort, la poitrine féconde,
Le talon qui, douze ans, éperonna le monde,
Et, d’un œil filial,
L’orbite du regard qui fascinait la foule,
Ce front prodigieux, ce crâne fait au moule
Du globe impérial !

Et croire entendre, en haut, dans tes noires entrailles,
Sortir du cliquetis des confuses batailles,
Des bouches du canon,
Des chevaux hennissants, des villes crénelées,
Des clairons, des tambours, du souffle des mêlées,
Ce bruit : Napoléon !

Rhéteurs embarrassés dans votre toge neuve,
Vous n’avez pas voulu consoler cette veuve
Vénérable aux partis !
Tout en vous partageant l’empire d’Alexandre,
Vous avez peur d’une ombre et peur d’un peu de cendre :
Oh ! vous êtes petits !


VI

Hélas ! hélas ! garde ta tombe !
Garde ton rocher écumant,