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Il est vrai : l’anarchie, aux têtes renaissantes
S’éveille, et rouvre encor ses gueules menaçantes ;
Le trône, sous ses coups, commence à chanceler ;
Mais, pour le soutenir, on nous verra voler.
Nous saurons oublier, dans ces moments d’épreuve,
Les dégoûts dont la haine à dessein nous abreuve.
Moi-même, lui gardant et mon bras et ma foi,
Dans l’exil, s’il le faut, j’irai suivre mon roi
Dussé-je, pour avoir servi la dynastie,
Me voir, à mon retour, puni d’une amnistie.
Et si, dans mes vieux jours, comme un vil condamné,
Au fond d’un noir cachot je me voyais traîné,
Sous le harnois guerrier si ma tête blanchie
D’un indigne soupçon n’était point affranchie ;
Si j’étais accusé, sans même être entendu,
D’avoir trahi ce roi que j’aurais défendu,
Montrant mon corps brisé, mes cicatrices vaines,
Et ce reste de sang, déjà froid dans mes veines,
J’irais dire à mon roi, s’il voulait l’épuiser :
« Sire, il est tout à vous, vous le pouvez verser. »