ODE TROISIÈME.
MOÏSE SUR LE NIL.
« Mes sœurs, l’onde est plus fraîche aux premiers feux du jour.
Venez : le moissonneur repose en son séjour ;
La rive est solitaire encore ;
Memphis élève à peine un murmure confus ;
Et nos chastes plaisirs, sous ces bosquets touffus,
N’ont d’autre témoin que l’aurore.
« Au palais de mon père on voit briller les arts ;
Mais ces bords pleins de fleurs charment plus mes regards
Qu’un bassin d’or ou de porphyre ;
Ces chants aériens sont mes concerts chéris ;
Je préfère aux parfums qu’on brûle en nos lambris
Le souffle embaumé du zéphire.
« Venez : l’onde est si calme et le ciel est si pur !
Laissez sur ces buissons flotter les plis d’azur
De vos ceintures transparentes ;
Détachez ma couronne et ces voiles jaloux ;
Car je veux aujourd’hui folâtrer avec vous,
Au sein des vagues murmurantes.
« Hâtons-nous… Mais parmi les brouillards du matin,
Que vois-je ? — Regardez à l’horizon lointain…