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LES DEUX ÎLES.


« — Là fut son berceau ! — Là sa tombe ! »
Pour les siècles, c’en est assez.
Ces mots, qu’un monde naisse ou tombe,
Ne seront jamais effacés.
Sur ces îles à l’aspect sombre
Viendront, à l’appel de son ombre,
Tous les peuples de l’avenir ;
Les foudres qui frappent leurs crêtes,
Et leurs écueils, et leurs tempêtes,
Ne sont plus que son souvenir !

Loin de nos rives, ébranlées
Par les orages de son sort,
Sur ces deux îles isolées
Dieu mit sa naissance et sa mort ;
Afin qu’il pût venir au monde
Sans qu’une secousse profonde
Annonçât son premier moment ;
Et que sur son lit militaire,
Enfin, sans remuer la terre,
Il pût expirer doucement !


II



Comme il était rêveur au matin de son âge !
Comme il était pensif au terme du voyage !
C’est qu’il avait joui de son rêve insensé ;
Du trône et de la gloire il savait le mensonge ;
Il avait vu de près ce que c’est qu’un tel songe,
Et quel est le néant d’un avenir passé !

Enfant, des visions, dans la Corse, sa mère,
Lui révélaient déjà sa couronne éphémère,