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possibles, c’était encore celui qui convenait le mieux. Cependant, afin qu’on ne cherche pas dans ce livre autre chose que ce qu’il renferme, et qu’on ne s’attende pas à trouver dans ces deux journaux une peinture historique, ou biographique, ou anecdotique, avec curiosités, particularités et noms propres, de l’année 1819 et de l’année 1830, nous insistons sur ce point, que ces deux journaux contiennent, non les faits, mais seulement le retentissement des faits.

La formation du second volume de cette collection n’a besoin que de quelques mots pour s’expliquer d’elle-même. C’est une série de fragments écrits à diverses époques, et publiés pour la plupart dans les recueils du temps où ils ont été écrits. Ces fragments sont disposés par ordre chronologique ; et ceux des lecteurs qui, en lisant chaque morceau, voudront ne point oublier la date qu’il porte, pourront remarquer de quelle façon l’idée de l’auteur mûrit d’année en année et dans la forme et dans le fond, depuis l’étude sur Voltaire, qui est de 1823, jusqu’à l’étude sur Mirabeau, qui est de 1834. C’est d’ailleurs peut-être la seule chose frappante de ce volume, à la composition duquel n’a été mêlé aucun arrangement artificiel, qu’il commence par le nom de Voltaire et finisse par le nom de Mirabeau. Cela montrerait, s’il n’en existait pas d’ailleurs beaucoup d’autres exemples à côté desquels celui-ci ne vaut pas la peine d’être compté, à quel point le dix-huitième siècle préoccupe le dix-neuvième. Voltaire, en effet, c’est le dix-huitième siècle système ; Mirabeau, c’est le dix-huitième siècle action.

Le premier de ces deux volumes enserre onze années de la vie intellectuelle de l’auteur, de 1819 à 1830. Le deuxième contient également onze années, de 1823 à 1834. Mais comme une partie de ce deuxième volume rentre dans l’intervalle de 1819 à 1830, les deux volumes réunis n’offrent le mouvement en bien ou en mal de la pensée de celui qui les a écrits que sur une échelle de quinze années, de 1819 à 1834.

Nous ne ferons aucune observation sur les dépouillements de style et de manière que la critique y pourra noter de saison en saison. L’esprit de tout écrivain progressif doit être comme le platane dont l’écorce se renouvelle à mesure que le tronc grossit.

Pour finir ce que nous avons à dire de ce livre, si l’on nous demandait de le caractériser d’un mot, nous dirions que ce n’est autre chose qu’une sorte d’herbier où la pensée de l’auteur a déposé, sous étiquette, un échantillon tel quel de ses diverses floraisons successives.

Que le lecteur de bonne foi compare, et juge si la loi selon laquelle s’est développée cette pensée est bonne ou mauvaise.

Maintenant il se rencontrera peut-être des esprits bienveillants et sérieux qui demanderont à l’auteur quelle est la formule actuelle de ses opinions sur la société et sur l’art.