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LE RHIN.

piliers de la grande cathédrale mystérieuse ; et, plongé dans la lecture de la nature, comme les vieux puritains dans la méditation de la bible, je cherche Dieu.

Ami, chacun a son livre, et, voyez-vous, dans l’évangile comme dans le paysage, la même main a écrit les mêmes choses. Quant à moi, je pense que toutes les faces de Jéhovah veulent et doivent être contemplées, et cette idée règle et remplit toutes mes rêveries depuis vingt ans ; vous le savez, vous, Louis, qui m’aimez et que j’aime. Je pense aussi que l’étude de la nature ne nuit en aucune façon à la pratique de la vie, et que l’esprit qui sait être libre et ailé parmi les oiseaux, parfumé parmi les fleurs, mobile et vibrant parmi les flots et les arbres, haut, serein et paisible parmi les montagnes, sait aussi, quand vient l’heure, et mieux peut-être que personne, être intelligent et éloquent parmi les hommes. Je ne suis rien, je le sais, mais je compose mon rien avec un petit morceau de tout.

Je vais ainsi toute la journée, sans trop savoir où je suis, l’œil le plus souvent fixé à terre, la tête courbée vers le sentier, les bras derrière le dos, laissant tomber les heures et ramassant les pensées quand j’en trouve. Je m’assieds dans ces excellents fauteuils revêtus de mousse, c’est-à-dire de velours vert, que l’antique Palès creuse au pied de tous les vieux chênes pour le voyageur fatigué ; je mets en liberté, pour ma bienvenue, comme un sou-

    qu’ils fermèrent ; les grenadiers de Picardie l’enfoncèrent à coups de hache, et, nonobstant leur grand feu, les poussèrent jusqu’à la porte du chasteau, que les assiégés fermèrent, et laissèrent dehors plus de cinq cents des leurs, qui furent tués ou pris.

    « … Les troupes entrèrent de toutes parts dans la ville qu’ils pillèrent, sans que les officiers généraux pussent l’empescher. Le chasteau demanda à capituler. Le maréchal duc de Lorges ne voulut pas accorder de condition. Ils se rendirent à discrétion, et sortirent le 23 au nombre de dix-huit cents hommes. Trois cents soldats prisonniers, qui avoient esté mis dans la grande église, mirent le feu aux deux clochers, qui se communiqua à la ville, et, quoi qu’on pût faire pour l’éteindre, en brûla la grande partie. On a trouvé quarante milliers de poudre, quantité de grenades, de bombes, douze pièces de canons en fonte et dix de fer. On s’est aussi rendu maître du pont de bateaux qu’ont fait les ennemis. »

    « Paris, 30 may 1693. Le roy partit de Compiègne le 22 du mois pour aller coucher à Roye ; le 23, il coucha à Péronne, le 24, à Cambray, et, le 25, au Quesnoy.

    « Le roy et la reyne de la Grande-Bretagne vinrent ici le 27 voir Leurs Altesses Royales, et ils entendirent le salut au monastère des Capucines. »

    Gazette du 6 juin.

    « … La ville estoit prise, les soldats, les cavaliers et les dragons y entrèrent de toutes parts et commencèrent à la piller… Les soldats ne purent estre arrestés, quelque peine que se donnassent les officiers pour empescher les suites du désordre et l’embrasement de la ville, quoy qu’ayant esté prise d’assaut, elle eût pu n’estre pas épargnée. Le marquis de Chamilly avoit fait d’abord mettre les prisonniers et plusieurs bourgeois avec leurs femmes et leurs enfans dans la grande église, comme en un lieu de seureté. Mais ces prisonniers mirent le feu aux deux clochers, d’où il se communiqua aux maisons de la