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Recevez toutes mes excuses et tous mes regrets.

Il y a un véritable talent de style et de pensée dans ce que vous m’envoyez. Je regrette que vous m’ayez presque ôté le droit de vous louer comme je le voudrais.

Agréez, monsieur, l’assurance de mes sentiments distingués.

Victor Hugo[1].


À Frédérick Lemaître[2].


Paris, 15 août.
Monsieur,

Je ne reçois votre lettre qu’aujourd’hui, au retour d’une petite excursion que je viens de faire à la campagne. Je m’empresse de vous répondre.

Vous savez, Monsieur, quelle est ma sympathie pour votre beau talent, et vous ne doutez pas du plaisir que j’aurai toujours à vous voir jouer un rôle de moi. Mais je crains que dans le cas actuel votre mémoire malheureusement vous serve mal. Vous avez tant de loyauté qu’il est impossible qu’en vous rappelant avec attention ce qui s’est passé entre M. Harel et nous, vous ne vous souveniez pas que vous aviez promis à M. Harel de venir à Paris prendre le rôle que je vous destinais[3] dès que M. Harel vous réclamerait, à quelque point que vous fussiez de votre congé. Vous aviez même ajouté, avec une grâce et un empressement dont j’ai été bien touché, que vous ne demanderiez aucune indemnité pour cela. Je vous avais donné parole en retour que le rôle ne serait donné à personne autre qu’à vous, si vous jugiez toujours à propos de remplir votre promesse de revenir quand vous seriez réclamé. Ces conditions verbales, Monsieur, j’ai poussé la loyauté et le désir de vous être agréable jusqu’à en faire des conditions écrites dans mon traité avec M. Harel en date du 15 juillet dernier. Et ce n’est que sur des preuves écrites que vous ne pourriez pas revenir en ce moment et que vous ne croyiez pas que vos intérêts vous permissent de remplir la promesse que vous aviez faite, que j’ai dû laisser M. Harel user du droit que lui réservait le traité dans ce cas-là seulement de chercher un autre acteur pour le rôle. Votre lettre aujourd’hui me donne de bien vifs regrets, je tenais tant à vous ! Je vais voir M. Harel, mais je crains bien qu’il ne soit plus temps. Croyez dans tous les cas que je n’aurai rien de plus pressé

  1. Communiquée par la librairie Cornuau.
  2. Inédite.
  3. Dans Marie Tudor.