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À Auguste Vacquerie.
H.-H., 27 juin.

J’ai écrit à M. de St-Victor. Quel admirable article ! Voici mon remercîment à M. Ed. Thierry. Tout doit passer par vous, car tout me vient de vous. Voulez-vous le lui remettre. Je ne vous dirai jamais assez comme je suis attendri de votre incomparable amitié. Vous avez tout voulu, tout fait, tout réussi. Puisque vous allez à Wiesbade, je donne ordre à mon vieux Rhin de vous guérir. Il me doit bien cela, et, cher ami, cher poëte, cher confrère et maître, buvez l’eau généreuse du Père des fleuves, et de ses vieilles ruines, sortez tout neuf. Ayez la santé, comme vous avez la gloire.

Ex imo. — tuus.

Post-scriptum.

Quelle étrange chose ! M. A. Blondeau, pour qui j’ai tant d’amitié, et qui m’en a tant montré et prouvé, m’est-il donc devenu hostile ? Je lis ceci, stupéfait[1] :

Vous savez que c’est le contraire qui est la vérité. J’ai refusé de recevoir le reliquat du traitement offert aux représentants par le coup d’état, et j’ai dit que je n’admettais rien de tronqué, pas plus l’indemnité que le mandat. Tout ou rien. Le droit.

Accepter un reliquat quelconque, c’était donner quittance au coup d’état[2].

  1. Extrait de journal collé sur la lettre :
    À celui de M. Amédée Blondeau, un cancan sur Victor Hugo, le lion d’hier et d’aujourd’hui, est superbe, mais pas généreux, comme vous allez voir.
    Vous savez qu’à tort ou à raison, on dit l’auteur de Ruy Blas très intéressé.
    Il paraît — circonstance bizarre — que son dernier jour de représentant ne lui a jamais été payé par le gouvernement de 1848.
    Aussi Hugo aurait-il toujours sur le cœur ces vingt-cinq francs.
    Un soir, dans un dîner chez Alexandre Dumas, les convives se disputèrent à propos d’une question de théâtre. La discussion prit des proportions telles, que de Cherville, voulant apaiser le bruit, dit sévèrement :
    Messieurs, parole d’honneur, on se croirait à la Chambre.
    À ces mots, Victor Hugo se lève, bondissant, et s’écrie :
    — Alors, je demande mes vingt-cinq francs !
  2. Actes et Paroles. Pendant l’exil. Historique. Édition de l’Imprimerie Nationale.