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ma maison du vieux Blois dont j’ai pris le croquis. Elle est aujourd’hui démolie. Je suis épris de la Gazette des Beaux-Arts. C’est vraiment un inappréciable recueil, et quant à la splendide eau-forte de ce pauvre grand artiste, je connais peu de choses plus belles et je n’en connais pas de plus navrante. J’intitule cela « Paris Fou ». Je pars dans quinze jours pour une excursion de trois mois. Je serai de retour à l’automne.

Venez donc me voir sur ma roche, regarder mon océan et manger mon raisin.

Je vous serre la main.

Victor Hugo[1].


À Brofferio.


Hauteville-House, 9 juin 1865.
Mon éloquent et cher ami,

J’ai reçu hier, seulement, 8 juin, vos trois admirables articles du 3, du 5 et du 11 janvier, dans le journal Le Alpi, sur mon livre William Shakespeare. Je m’empresse de vous remercier ; mais cette lettre vous parviendra-t-elle ? Je l’adresse un peu au hasard. Il me semble qu’un nom comme le vôtre est aussi facile à trouver en Italie qu’un phare sur la mer. J’ai reconnu dans vos trois articles sur mon livre toute votre haute éloquence, et ce ferme caractère, et cette verve puissante et charmante, et toutes les formes éclatantes de votre esprit qui vous font aussi éminent comme écrivain que comme orateur. Votre place est parmi les grandes renommées d’Europe. L’Italie vous possède, mais le monde vous a.

Je suis profondément touché de ce souvenir que, du milieu de votre succès et de votre triomphe, vous envoyez à mon exil.

Votre amitié est un des sourires que me laisse entrevoir dans mes ténèbres la destinée. Je vous envoie toute mon émotion attendrie.

J’aime en vous le combattant de l’Italie, l’athlète de la liberté, l’orateur de la lumière. Je me rappelle qu’il y a quatorze ans, je vous donnais rendez-vous au Parlement d’Europe.

Pourquoi pas ? Les temps approchent.

Je vous serre la main.

Victor Hugo[2].
  1. La Revue, octobre 1903.
  2. La Presse, 27 juin 1865.