Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome II.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de votre nom et un grand succès. Faites vite afin de nous venir rejoindre bientôt.

Chose étrange qu’il y ait à cette heure en France un homme auquel on puisse dire : Vous êtes libre ! Je me dépêche de vous le dire, pour la curiosité du fait, ce matin 8 mai. Vous, de votre côté, dépêchez-vous de mettre votre liberté en sûreté dans l’exil.

Je vous serre les deux mains.

V.[1]


À Madame Victor Hugo[2].


Bruxelles, 15 mai [1852] 4 h. 1/2.

Je ne voulais t’écrire, chère amie, qu’après avoir vu M. Piddington pour l’affaire de Londres. Je pense comme toi qu’elle traîne un peu, et je voulais t’envoyer un résultat positif, mais voici une occasion pour Paris, et je ne veux pas la laisser échapper. M. Piddington ne m’est annoncé que pour demain dimanche. Je t’écrirai ce qu’il m’aura dit par le retour de M. Stingeray qui sera jeudi ou vendredi à Paris.

En ce moment Charles achève son article pour le Siècle. Il va me le lire tout à l’heure. Je te l’enverrai sous ce pli. Depuis quelques jours Charles a bien et beaucoup travaillé ; je suis content de lui. Mais ce n’est encore qu’un commencement. Il faut que cela continue.

J’ai reçu une nouvelle lettre de M. Trouvé-Chauvel. C’est lui qui m’annonce l’arrivée de M. Piddington pour dimanche. L’affaire est toujours en bon train, cependant je vois poindre précisément l’obstacle que je craignais. Les libraires de Londres craignent, eux aussi, un procès de Louis Bonaparte, — l’imitation du procès fait par le premier Consul à Peltier pendant la paix d’Amiens[3]. Ils demandent communication préalable de mon manuscrit. J’ai répondu tout de suite et courrier par courrier que j’étais prêt à lire sur place tout ce qu’on voudrait, mais que je ne confierais le manuscrit à personne, que du reste mon livre était d’un bout à l’autre indigné et impitoyable pour le guet-apens de Bonaparte, qu’en aucun cas je ne consentirais à l’atténuer, et que si la liberté de la presse n’existait plus, même en Angleterre , j’aimerais mieux enfouir mon livre que l’amoindrir. J’attends la réponse. Je pense qu’ils n’insisteront pas.

  1. Bibliothèque Nationale. Lettre insérée dans le volume de G. Bertal. Auguste Vacquerie.
  2. Inédite.
  3. Peltier fut poursuivi pour outrages au premier consul dans un article publié à Londres en 1802.