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Je sais que Votre Majesté a toujours aimé les lettres, et qu’elle les a cultivées avec un éclat tel qu’il a rehaussé jusqu’à une couronne. Aussi votre suffrage, si éclairé et si bienveillant, m’est-il glorieux de toutes les manières. Permettez-moi donc, sire, d’offrir à Votre Majesté, comme un hommage personnel, un exemplaire de mon dernier ouvrage. M. Poinset partant demain, le temps me manque pour le présenter à Votre Majesté sous une forme plus digne d’elle. J’espère que vous le lirez avec indulgence. Vous y verrez, comme dans tous mes autres ouvrages, le nom de l’empereur[1]. Je le mets partout, parce que je le vois partout. Si Votre Majesté m’a fait l’honneur de lire ce que j’ai publié jusqu’ici, elle a pu remarquer qu’à chacun de mes ouvrages mon admiration pour son illustre frère est de plus en plus profonde, de plus en plus sentie, de plus en plus dégagée de l’alliage royaliste de mes premières années. Comptez sur moi, sire ; le peu que je puis, je le ferai pour l’héritier du plus grand nom qui soit au monde. Je crois qu’il peut sauver la France. Je le dirai, je l’écrirai, et, s’il plaît à Dieu, je l’imprimerai.

Ce que vous avez fait pour mon père, pour ma famille, ne sortira jamais de mon cœur ni de ma mémoire. En portant le plus haut que je puis le nom de Napoléon, en le défendant, comme un soldat fidèle, contre toute attaque, contre toute injure, je satisfais tout ensemble ma conscience et ma reconnaissance. J’ai à la fois le double bonheur de remplir mon devoir et d’acquitter une dette.

Je suis avec respect, de Votre Majesté, le très humble serviteur.

Victor Hugo[2].


À Monsieur Cordellier-Delanoue[3].


Ce dimanche, 25 septembre [1831].

C’est moi, mon cher et excellent ami, qui renonce tout de suite et à l’instant même à Louis XVI[4], du moins jusqu’à ce que Strafford soit joué. Tenez-vous ceci pour dit. Et allez, mon ami, le plaisir que j’éprouve à vous faire ce sacrifice est plus grand que le sacrifice, si sacrifice il y a.

  1. Marion de Lorme, préface.
  2. Brouillon. Archives de la famille de Victor Hugo.
  3. Cordellier-Delanoue collabora tout jeune à la France littéraire, puis aborda tous les genres, poésie, roman, théâtre.
  4. Victor Hugo avait eu à ce moment l’idée d’écrire un drame où il aurait mis Bonaparte en présence de Louis XVI, comme M. Cordellier-Delanoue mettait Cromwell en face de Charles Ier. Le drame de Cordellier-Delanoue fut représenté au théâtre de la Porte Saint-Martin le 21 mai 1835 sous le titre : Cromwell et Charles Ier.