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demander, mais encore à garder un silence absolu sur ce sujet, et notamment sur cette expression d’ordre, qui n’est pas le mot propre, et qui, en conséquence des paroles mêmes de M. Z…, me semble une notable excursion de M. Z… dans ce domaine, tout à la fois aride et vaporeux, étroit et illimité, du romantique.

Quoi qu’il en soit, j’ai lu aujourd’hui avec un plaisir que M. Z… est habitué à faire éprouver à tous ses lecteurs le nouvel article qu’il veut bien me consacrer. J’avoue que je suis surpris de l’erreur historique qu’il paraît m’imposer. Il me semble que les siècles littéraires ne se mesurent pas avec la même rigoureuse exactitude que les siècles historiques. Dans l’histoire et pour la chronologie, le dix-septième siècle a commencé le 1er janvier 1600 et a fini le 1er janvier 1700. Dans les lettres, le dix-septième siècle a commencé avec Corneille, Racine, Bossuet, Pascal, Molière, La Fontaine, Boileau, etc., et n’a fini qu’avec ces écrivains illustres, dont plusieurs pourtant ont prolongé leur vie jusque dans le dix-huitième siècle. On peut, ce me semble, dire, en dépit de la chronologie, que Lucain, Sénèque et Pline le Jeune, appartiennent tous trois au deuxième siècle ou à la deuxième époque littéraire de Rome. On pourrait dire encore que J.-B. Rousseau, par la couleur de quelques-unes de ses odes, appartient plutôt au dix-septième siècle qu’au dix-huitième siècle, où il a historiquement vécu. On pourrait même avancer que M. Z…, par la tournure vive et piquante de son esprit, appartient bien plus au siècle de Voltaire qu’au siècle de Bonaparte. Ce n’est cependant pas moi qui me plaindrai de le compter au nombre de nos contemporains.

Malgré la distinction un peu subtile de M. Z…, je persiste à croire qu’on peut être revêtu d’un nuage sans porter une robe de vapeur. D’ailleurs, puisque M. Z... veut absolument des formes et des contours, le mot robe lui présente l’image que la vapeur lui refuse, à ce qu’il paraît.

Mon spirituel adversaire, qui ne veut pas qu’on puisse se vêtir d’une abstraction, ne s’est point expliqué sur le vers de Rousseau :

Un vice complaisant de grâce revêtu.

Je passe rapidement sur ces détails philosophiques, dont je ne sais pas, comme M. Z…, parer l’aridité, et je me borne à lui exprimer tous mes regrets de ce qu’il n’a pas jugé à propos de m’expliquer par quels procédés les romantiques « tirent des corps du monde des idées ». C’était là cependant le fond de son article ; cette pierre d’achoppement était la clef de sa voûte ou, s’il le préfère, le fondement de son édifice.

Voilà où les lecteurs l’attendent encore.

Quant à moi, qui ai déjà reçu plus d’une preuve de l’extrême bienveillance de M. Z…, je le remercie bien sincèrement des nouvelles critiques