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santes qu’elles soulagent toutes les douleurs dans tous les instants. Simples et tendres, elles sont comme le remède unique et universel des maladies de l’âme. Et avec qui doit-on mieux sentir cette vérité qu’avec un ami tel que vous ? Vous m’avez confirmé dans cette conviction qui m’est venue depuis longtemps, c’est qu’un homme supérieur aime avec son génie, comme il écrit avec son âme.

Je vous remercie bien vivement de la correction que vous m’avez indiquée[1]. Vous verrez dans mon volume si je suis docile. Je regrette seulement que vous n’ayez pas été plus sévère et que vous n’ayez pas écouté plus souvent en lisant ces deux odes votre goût excellent. Vous m’auriez certainement aidé à faire disparaître bien des taches et ce serait une reconnaissance de plus que je vous devrais. Au reste, vous verrez dans ce recueil, aux nombreuses corrections que j’ai faites, que j’ai eu l’intention de rendre ces ouvrages le moins imparfaits possible ; et cette intention me suffira, j’en suis sûr, auprès de vous. L’intérêt que vous prenez à mes affaires à la maison du roi m’a également vivement touché. J’ai en ce moment l’assurance que les promesses dont on me berce depuis si longtemps seront réalisées avant six semaines. J’attends avec impatience ce moment qui fixera mon avenir et me permettra de songer à vivre et à être heureux. Il faut souvent tant de circonstances matérielles pour réaliser le rêve le plus pur et le plus idéal.

Adieu, cher et illustre ami, écrivez-moi, vos lettres me font tant de bien ! et mêlez quelquefois mon souvenir à vos pensées et mon nom à vos prières.

Victor.

Parlez-moi, de grâce, du point où en est le troisième volume de votre admirable ouvrage[2].


Monsieur le général Hugo
à sa terre de Saint-Lazare, près de Blois.
Paris, 4 juillet.
Mon cher papa,

Je mettais à suivre la demande de la Société[3] autant d’activité que le bureau des belles-lettres y mettait de lenteur. Enfin, il y a quelques

  1. « Je vous demande une correction dans un seul vers :
    Qu’il s’épure à ces eaux où s’épura Dieu même.
    Cette dernière pensée n’est pas exacte, vous le voyez bien. Dieu, qui est la pureté même, ne

    peut en aucun sens s’épurer. Si le vers le permettait j’aimerais mieux : que sanctifia, que féconda Dieu même. Mais vous trouverez aisément ce qu’il convient de substituer. » (Lettre de Lamennais, 21 avril 1822.)

  2. Essai sur l’Indifférence en matière de religion. — Archives de la famille de Victor Hugo.
  3. Société d’émulation, fondée à Blois, dont le général faisait partie et qui avait besoin de l’autorisation ministérielle.