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[UN DESCENDANT DE CORNEILLE.]


1er avril 1849.

Hier on m’a apporté à la Chambre un papier plié.

— Qu’est-ce que c’est ? ai-je dit à l’huissier.

L’huissier m’a répondu :

— C’est un monsieur qui vous demande.

J’ai ouvert le papier et j’y ai lu ce nom : Pierre Corneille.

Je suis allé à la salle des quatre colonnes où quelqu’un m’attendait en effet.

C’était un petit homme maigre, vieux, ridé, presque blanc, boitant de la jambe gauche, appuyé sur un gros bâton, n’ayant de remarquable que ses yeux éteints et sa mâchoire carrée, avec cela une cravate noire devenue rousse, une redingote sans boutons, une pièce grossièrement cousue au genou droit de son pantalon, des souliers de roulier, une chemise de forçat, l’air étrangement chétif, accablé et misérable. C’était cet homme qui s’appelait Pierre Corneille.

J’avais devant moi un petit-fils du grand Corneille.

Cet homme me remit une demande pour le président Louis Bonaparte, dans laquelle il y avait force fautes d’orthographe.