Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Choses vues, tome II.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.

On mangeait du pain bis, on mange du pain noir. Le même pour tous. C’est bien.

Les nouvelles d’hier ont été apportées par deux pigeons.

Une bombe a tué cinq enfants dans une école rue de Vaugirard.

Les représentations et les lectures des Châtiments ont dû cesser, les théâtres n’ayant plus de gaz pour l’éclairage et de charbon pour le chauffage.

Mort de Prim. Il a été tué à Madrid d’un coup de pistolet le jour où le roi de sa façon, Amédée, duc de Gênes, entrait en Espagne.

Le bombardement a été furieux aujourd’hui. Un obus a troué la chapelle de la Vierge à Saint-Sulpice où ma mère a été enterrée et où j’ai été marié.

J’ai été voir Mlle Louise Bertin.


10 janvier. — Bombes sur l’Odéon.

Envoi d’un éclat d’obus par Chifflart[1]. Cet obus, tombé à Auteuil, est marqué H. Je m’en ferai un encrier.


12 janvier. — Le pavillon de Rohan me demande, à partir d’aujourd’hui, 8 francs par tête pour le dîner, ce qui avec le vin, le café, le feu, etc., porte le dîner à 13 francs par personne.

Nous avons mangé ce matin un beefsteak d’éléphant.

Ont dîné avec nous Schœlcher, Rochefort, Blum, et tous nos convives ordinaires du jeudi. Nous étions encore treize. Après le dîner, Louis Blanc, Paul Foucher, Pelletan.


13 janvier. — Un œuf coûte 2 fr. 75. La viande d’éléphant coûte 40 francs la livre. Un sac d’oignons 800 francs[2].

Éd. Lockroy[3], qui part cette nuit pour les avant-postes, avec le bataillon qu’il commande, est venu dîner avec moi.

La Société des gens de lettres m’a demandé d’assister à la remise des canons à l’Hôtel de Ville. Je me suis excusé. Je n’irai pas.

On a passé la journée à chercher un autre hôtel. Rien n’est possible. Tout est fermé. Dépense de la semaine au pavillon de Rohan (y compris un carreau cassé), 701 fr. 50.

  1. Peintre et dessinateur. (Note de l’éditeur.)
  2. Voir Notes, page 249.
  3. Journaliste ; prit part à l’expédition des Mille, conduite par Garibaldi ; devint, en 1871, membre de l’Assemblée nationale et fut à diverses reprises ministre du Commerce, de l’Instruction publique et de la Marine. Édouard Lockroy épousa la veuve de Charles Hugo. (Note de l’éditeur.)