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et tête haute ; derrière soi, à portée de la main, dans le bagage, une foule de théories de toutes dimensions, c’est-à-dire des échelles pour monter à tout.




J’ai toujours éprouvé pour cet illustre homme d’État, pour cet éminent orateur, pour cet historien distingué, pour cet écrivain médiocre, pour ce cœur étroit et petit, un sentiment indéfinissable d’enthousiasme, d’aversion et de dédain.




II

CAVAIGNAC.


Juillet 1848.

C’était un peintre.

Voici comment il faisait le portrait du chef du pouvoir exécutif :

Cavaignac, un nez dans du poil.




III

DUFAURE.


M. Dufaure est un avocat de Saintes qui était le premier de sa ville vers 1833. Ceci le poussa à la Chambre. M. Dufaure y arriva avec un accent provincial et enchifrené qui était étrange, mais c’était un esprit clair jusqu’à être parfois lumineux, précis jusqu’à être parfois décisif. Avec cela une parole lente et froide, mais sûre, solide, et poussant avec calme les difficultés devant elle.

M. Dufaure réussit. Il fut député, puis ministre. Ce n’est pas un sage, c’est un homme honnête et grave, qui a tenu le pouvoir sans grandeur, mais avec probité, et qui tient la tribune sans éclat, mais avec autorité.

Sa personne ressemble à son talent, elle est digne, simple et terne. Il vient à la Chambre boutonné dans une redingote gris-noir, avec une cravate noire et un collet de chemise qui lui monte aux oreilles. Il a un gros nez, les lèvres épaisses, les sourcils épais, l’œil intelligent et sévère, et des cheveux gris en désordre.

M. Dufaure est extrêmement lié avec M. Vivien qui est enchifrené comme lui.

Le jour où Cavaignac le choisit comme ministre à la place de M. Sénart, M. Portalis l’attaqua comme ancien ministre de Louis-Philippe. M. Dufaure,