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CONTÉ PAR LE ROI JÉRÔME.


Le lendemain du jour où Jérôme, rappelé de l’exil, était rentré à Paris, comme le soir venait et qu’il avait attendu vainement son secrétaire, s’ennuyant et seul, il sortit. C’était la fin de l’été (1847). Jérôme était descendu chez sa fille, la princesse Demidoff, dont l’hôtel touchait aux Champs-Élysées.

Il traversa la place de la Concorde, regardant tout autour de lui ces statues, cet obélisque, ces fontaines, toutes ces choses nouvelles pour l’exilé qui n’avait pas vu Paris depuis trente-deux ans. Il suivit le quai des Tuileries. Je ne sais quelle rêverie lui entrait peu à peu dans l’âme.

Arrivé au pavillon de Flore, il entra sous le guichet, tourna à gauche, prit un escalier sous la voûte et monta. Il avait monté deux ou trois marches, quand il se sentit saisir le bras. C’était le portier qui courait après lui.

— Eh ! Monsieur, Monsieur ! où allez-vous donc ?

Jérôme le regarda d’un air surpris et répondit :

— Parbleu ! chez moi.

À peine avait-il prononcé ce mot qu’il se réveilla de son rêve. Le passé l’avait enivré un moment. En me contant cela, il ajoutait : — Je m’en allai tout honteux, en faisant des excuses au portier.