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LE DUC DE PRASLIN[1].


18 août, 4 heures de l’après-midi.

J’apprends à l’instant que Mme la duchesse de Praslin a été assassinée cette nuit dans son hôtel, faubourg Saint-Honoré, 55. Il y a des circonstances singulières que je compte écrire.


20 août

La cour des pairs est convoquée pour demain afin de mettre en prévention M. de Praslin.


Samedi, 21 août. Écrit en séance.

À deux heures sept minutes, la séance publique est ouverte. Le garde des sceaux Hébert monte à la tribune et donne lecture de l’ordonnance qui constitue la cour des pairs.

Il y a des femmes dans les tribunes. Un homme gras, chauve et blanc, rouge de visage, ressemblant singulièrement à Parmentier, est dans la tribune de l’Ouest et attire un moment l’attention des pairs.

Le chancelier fait évacuer les tribunes, on introduit le procureur général Delangle et l’avocat général Bresson, en robes rouges. Le chancelier remarque que les tribunes ne sont pas complètement évacuées, celle des journalistes entre autres ; il se fâche et donne des ordres aux huissiers. Les tribunes s’évacuent avec quelque peine.

M. de Praslin a été arrêté hier et transféré à la geôle de la Chambre sur mandat du chancelier. M. de Boissy proteste. MM. de Pontécoulant, Cousin et Portalis soutiennent ainsi que le chancelier la légalité du fait ; mais il n’en

  1. Le duc de Choiseul-Praslin vécut en bonne intelligence avec sa femme jusqu’en 1840, lorsqu’il eut, à partir de cette époque, les gouvernantes de ses enfants pour maîtresses ; l’une d’elles, Mlle Deluzy, exerça une grande autorité dans la maison ; la vie devenait intolérable pour la duchesse, et à la suite de plaintes violentes de sa femme et d’une menace en séparation, le duc consentit à éloigner Mlle Déluzy, tout en continuant à lui rendre visite.

    Le 18 août 1847 la duchesse mourut frappée de trente coups de couteau. (Note de l’éditeur.)