Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Choses vues, tome I.djvu/123

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’enfant ne se fait pas prier, et commence avec sa petite voix naïve, ses beaux yeux honnêtes et doux toujours fixés sur Salvandy :

On se croit aisément un personnage en France.
Octobre 1844.




V


M. Santy, Centi, Santhi ou Sentil est un ancien secrétaire de M. Thiers. Ce pauvre diable vient de faire une tragédie. Cela s’appelle le Comte d’Egmont. C’est fort plat. La pièce se joue, succès classique, pas un chat dans la salle, pas un sou dans la caisse. Le lieu de la scène est à l’Odéon. Après trois représentations, la tragédie disparaît de l’affiche. L’auteur accourt, furieux, essoufflé. Il aborde le directeur, M. Lireux. Dialogue :

— Monsieur, vous ne jouez pas ma pièce ?

— C’est vrai, Monsieur.

— Pourquoi cela, Monsieur ?

— Parce qu’elle ne fait pas d’argent, Monsieur.

— Monsieur, je suis prêt à prouver qu’elle ne fait que cent francs de moins que le Bachelier de Ségovie de M. Casimir Bonjour joué par vous en ce moment.

— Cent francs de moins, c’est juste, Monsieur, fait Lireux, et je ne conteste pas. La plus forte recette du Bachelier de Ségovie a été de quatre-vingt-dix-neuf francs.

Novembre 1844.




VI

LE CHANCELIER PASQUIER.


Philémon et Baucis ne sont plus une rareté. Le vieux couple se multiplie parmi nous à beaucoup d’exemplaires, au mariage près. Il y a la duchesse de Vienne et le baron de Vitrolles, Mme de Castellane et M. Molé, M. de Chateaubriand et Mme Récamier, M. Guizot et la princesse de Liéven,