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422 RELIQUAT. — I. — ASSEMBLÉE CONSTITUANTE. [LA CENSURE ET LE THEATRE.] Félix Pyat avait proposé à l’Assemblée un amendement contre le droit de censure en matière théâtrale (article 8, paragraphe 3). — M. Vivien appuya le droit de cen- sure ; Victor Hugo alors demanda la parole. Nous avons extrait du Moniteur ce discours non recueilli dans Aêfes et Paroles. 20 septembre 1848. L’impatience de l’Assemblée m’avertit qu’il ne lui semble pas que cette question puisse être discutée à fond et avec les développements nécessaires, aujourd’hui. {Oui ! oui ! Parle^ !) Je ne prétends pas la traiter. L’Assemblée comprend qu’une pareille matière soulève des idées qui prendraient probablement le reste de la séance. Je ne veux donc pas donner en ce moment, à cette discussion, les proportions qu’elle appellerait naturellement, et j’ajoute que, dans ma pensée, l’heure serait mal choisie pour entrer dans une contestation aussi considérable. Je sais que dans la pensée de beaucoup trop de membres de cette Assemblée, je le regrette, les questions de théâtre semblent des questions futiles . . . {Non ! non ! — Celf vrai ! c’eB vrai !) J’accepte cette interruption, et j’en remercie les interrupteurs j je vois que le jour où les lois organiques amèneront cette grande question devant vous, nous pourrons l’approfondir, assurés d’avance de la bienveillance de l’Assemblée. {Oui ! oui !) Je me borne à faire remarquer aujourd’hui que tout ce qui vient d’être dit tout à l’heure, contre la liberté du théâtre, a été dit, dans le temps, contre la liberté de la presse. La liberté de la presse a répondu. Comment ? En marchant, et en faisant marcher la civilisation j le théâtre, qui sera libre un jour, n’en doutez pas, fera la même réponse aux mêmes préventions. Messieurs, voilà ce que nous eussions désiré, et ceci, je le déclare du fond de ma conscience, dans l’intérêt même de la Constitution ; oui, pour l’honneur de votre Constitution, nous eussions désiré que la liberté de l’intelligence tout entière j fût inscrite. {Interruption.) Oui, j’y insiste, et je dis ceci pour vous législateurs, plus encore que pour nous écrivains ! YdiW ce que nous demandions, je le répète, pour l’honneur même de votre Constitution. Car, sachez-le bien, la durée de votre Constitution se mesurera à la grandeur des principes qu’elle contiendra. {Mouvement.) Je vois avec une surprise amère toutes les idées de Hberté se défigurer et s’amoindrir dans cette discussion d’une Constitution républicaine. {Plusieurs voix : Oui ! oui !) Aucune idée de liberté n’a encore été admise par vous entière. {Mouvement.) Ne trouvez-vous pas quelque inconvénient à faire voir ainsi par les faits que la République, comme vous l’entendez, est moins libérale que ne l’était la monarchie ? Car, je le déclare, la prohibition qui frappait la censure dans la charte de 1830 était beaucoup