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pas le peu de force qui me reste et dont j’ai besoin encore pour quelques instants. — Écoutez-moi. Le duc est jaloux de vous, le duc vous croit mon amant. Le duc ne m’a laissé d’autre alternative que de vous voir poignarder devant moi par Rustighello, ou de vous verser moi-même le poison. Un poison redoutable, Gennaro, un poison dont la seule idée fait pâlir tout italien qui sait l’histoire de ces vingt dernières années…

Gennaro.

Oui, le poison des Borgia !

Dona Lucrezia.

Vous en avez bu. Personne au monde ne connaît de contre-poison à cette composition terrible, personne, excepté le pape, monsieur de Valentinois, et moi. Tenez, voyez cette fiole que je porte toujours cachée dans ma ceinture. Cette fiole, Gennaro, c’est la vie, c’est la santé, c’est le salut. Une seule goutte sur vos lèvres, et vous êtes sauvé !

Elle veut approcher la fiole des lèvres de Gennaro, il recule.
Gennaro, la regardant fixement.

Madame, qui est-ce qui me dit que ce n’est pas cela qui est du poison ?