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selon la méthode des lamaseries, jusqu'à ce qu'elle se fût bien gravée dans notre mémoire. Le soir, notre maître nous faisait réciter le fragment de dialogue qu'il nous avait écrit le matin, et rectifiait ce qu'il y avait de vicieux dans notre prononciation. Sandara s'acquittait de sa charge avec talent et amabilité : quelquefois pendant la journée, en guise de récréation, il nous donnait des détails pleins d'intérêt sur le Thibet et sur les lamaseries qu'il avait visitées. Nous ne pouvions écouter les récits de ce jeune Lama, sans être saisis d'admiration : nulle part nous n'avions jamais entendu personne s'exprimer avec une si grande aisance et d'une manière si piquante ; les choses les plus simples et les plus communes devenaient, dans sa bouche, pittoresques et pleines de charmes ; il était surtout remarquable quand il voulait faire adopter aux autres sa manière de voir. Son éloquence était naturelle et entraînante.

Après avoir surmonté les premières difficultés de la langue thibétaine, et nous être familiarisés avec les expressions qui sont d'un usage journalier, nous cherchâmes à donner à nos études une direction toute religieuse. Nous engageâmes Sandara à nous traduire en style sacré les prières catholiques les plus importantes, telles que l'Oraison dominicale, la Salutation angélique, le Symbole des apôtres, et les Commandements de Dieu : de là nous primes occasion de lui exposer les vérités de la religion chrétienne. Il parut d'abord extrêmement frappé de cette doctrine nouvelle pour lui, et si différente des enseignements vagues et incohérents du bouddhisme. Bientôt il attacha une si grande importance à l'étude de la religion chrétienne, qu'il abandonna complètement les livres lamaïques qu'il avait apporté