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Cette ambassade ne faisait guère que d'arriver à Péking ; elle ne pouvait être de retour que dans huit mois. Ce long retard nous parut ruineux.Comment, avec nos modiques ressources, nourrir dans une auberge cinq animaux pendant un si long temps ? Ayant tout pesé, tout calculé ..., A la garde de Dieu, dîmes-nous, et partons. Nous annonçâmes notre résolution aux Tartares qui en furent dans l'enthousiasme. Aussitôt le chef de la Maison de repos fut chargé de nous acheter de la farine pour quatre mois. — Pourquoi des provisions pour quatre mois, nous dirent les Tartares ? — On dit que la route est de trois mois au moins, il est bon de s'approvisionner pour quatre, en cas d'accident. — C'est vrai ; l'ambassade thibétaine met beaucoup de temps à faire cette route. Mais, nous autres Tartares, nous voyageons autrement ; il nous faut au plus une lune et demie ; nous allons au galop, tous les jours nous parcourons à peu près deux cents lis (vingt lieues) ... Ces paroles nous firent spontanément changer de résolution. Nous étions dans l'impossibilité absolue de suivre cette caravane. D'abord, pour notre compte, n'étant pas accoutumés, comme les Tartares, à des marches forcées, nous eussions été tués au bout de quelques jours ; puis nos animaux, maigres et épuisés par quatre mois de fatigues continuelles, n'eussent pu résister longtemps au galop de nos compagnons. Les Tartares avaient à leur disposition une quarantaine de chameaux ; ils pouvaient impunément en crever la moitié. Ils convinrent qu'avec nos trois chameaux, il était impossible de se mettre en route ; aussi nous conseillaient-ils d'en acheter une douzaine. Le conseil était, en soi, excellent ; mais relativement à notre