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était prodigieux en fait de bavardage. Le premier jour, il nous amusa assez ; mais il ne tarda pas à nous être à charge. Il se croyait obligé, en sa qualité de musulman, de nous parler à tout propos de l'Arabie et de ses chevaux qui se vendent leur pesant d'or, de Mahomet et de son fameux sabre qui coupait les métaux, de la Mecque et de ses remparts en bronze.

Depuis Lithang jusqu'à Ta-Tsien-Lou, ville frontière de Chine, on ne compte que six cents lis, qui se divisent en huit étapes. Nous trouvâmes la fin de cette affreuse route du Thibet, en tout semblable à son milieu et à son commencement. Nous avions beau franchir des montagnes, nous en trouvions toujours de nouvelles devant nous : montagnes toujours d'un aspect menaçant, toujours couvertes de neiges et semées de précipices. La température n'avait pas subi non plus un changement sensible. Il nous semblait que, depuis notre départ de Lha-Ssa, nous ne faisions que nous mouvoir dans un même cercle. Cependant, à mesure que nous avancions, les villages devenaient plus fréquents, sans pourtant rien perdre de leur style thibétain. Le plus important de ces villages est Makian-Dsoung, où quelques marchands chinois tiennent des magasins pour approvisionner les caravanes. A une journée de Makian-Dsoung, on passe en bateau le Ya-Loung-Kiang, rivière large et rapide. Sa source est aux pieds des monts Bayen-Kharat, tout près de celle du fleuve Jaune. Elle se réunit au Kin-Cha-Kiang, dans la province du Sse-Tchouen. D'après les traditions du pays, les bords du Ya-Loung-Kiang auraient été le premier berceau de la nation thibétaine.