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tout à coup, et comme par enchantement, en présence d'une contrée qui offrait à nos regards toutes les merveilles de la végétation la plus riche et la plus variée. Le contraste surtout était saisissant : d'un côté, un pays stérile, sombre, montagneux, et presque toujours désert ; de l'autre, au contraire, une plaine riante, où de nombreux habitants se livraient, au milieu de fertiles campagnes, aux travaux de la vie agricole. L'Itinéraire chinois dit : «  Le canton de Bathang est une belle plaine de mille lis de longueur, bien arrosée par des ruisseaux et des sources ; le ciel y est clair, le climat agréable, et tout y réjouit le cœur et les yeux de l'homme. » Nous descendîmes à la hâte le versant de montagne, et nous continuâmes notre route dans un véritable jardin, parmi des arbres on fleur, et le long de vertes rizières. Une douce chaleur pénétra, peu à peu, nos membres, et bientôt nous sentîmes la pesanteur de nos habits fourrés ; il y avait plus de deux ans que nous n'avions sué ; il nous semblait tout singulier d'avoir chaud, sans être devant un bon feu.

Aux environs de la ville de Balhang, les soldats de la garnison se trouvèrent en ligne, pour rendre les honneurs militaires au Pacificateur des royaumes, qui, empaqueté au fond de son palanquin, passa au milieu des rangs d'une façon très-peu guerrière. La population thibétaine, qui était tout entière sur pied, accompagna la caravane jusqu'à une belle pagode chinoise qui devait nous servir de logement. Le soir même, les Mandarins de la garnison chinoise et les Grands-Lamas de la ville vinrent nous rendre visite, et nous faire des offrandes de viande de bœuf et de mouton, de beurre, de farine, de chandelles, de lard, de riz, de