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sur les flancs escarpés de la montagne. Les conducteurs de Lang-Ki-Tsoung, nous dirent que c'était une troupe de Lamas qui revenait du pèlerinage de Lha-Ssa-Morou, et qui avait campé pendant la nuit à l'extrémité de la vallée. La vue de ces nombreux voyageurs ranima notre courage, et nous entreprîmes avec ardeur l'ascension de la montagne. Avant que nous fussions arrivés au sommet, le vent se mit à souffler avec impétuosité, et à bouleverser la neige : on eût dit que la montagne tout entière entrait en décomposition ; la montée devenait si escarpée, que ni hommes ni animaux n'avaient plus la force de grimper. Les chevaux s'abattaient presque à chaque pas ; et s'ils n'eussent été retenus par de grands amas de neige, plus d'une fois ils eussent rapidement roulé jusqu'à la vallée de Lang-KiTsoung, M. Gabet, qui ne s'était jamais bien remis de la maladie que lui avait occasionnée notre premier voyage, fut sur le point de ne pouvoir arriver au haut du Tanda ; n'ayant plus la force de se tenir cramponné à la queue de son cheval, il tomba d'épuisement, et resta presque entièrement enseveli dans la neige. Les hommes de l'escorte thibétaine allèrent à son secours, et parvinrent, après de longs et pénibles efforts, à le hisser jusqu'au sommet ; il y arriva plus mort que vif : sa figure était livide, et sa poitrine haletante faisait entendre un bruit semblable au râle de la mort.

Nous rencontrâmes sur le plateau de la montagne, les Lamas-pèlerins qui nous avaient précédés ; ils étaient tous couchés dans la neige, ayant à côté d'eux leur long bâton ferré. Quelques ânes, chargés de bagages, étaient serrés les uns contre les autres, grelottant au vent, et portant bas leurs longues oreilles. Quant tout le monde eut suffisamment