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la feuille de route scellée du sceau du Talé-Lama et de celui de l'ambassadeur chinois, ils demeurent impassibles. A tous les discours qu'on leur adresse, pour les engager à se soumettre à la loi, ils n'ont que cette réponse : Pour un conducteur, vous donnerez tant ; pour un cheval, tant ; pour un yak, tant .... La diplomatie chinoise est enfin poussée à bout, et il faut payer les oulah.

Les habitants du district de Midchoukoung nous traitèrent avec beaucoup de politesse et de courtoisie : les chefs du village nous firent donner une représentation par une troupe de saltimbanques, qui se trouvaient réunis dans le pays pour les fêtes du nouvel an. La vaste cour de l'hôtellerie où nous étions logés servit de théâtre : d'abord les artistes masqués, et bizarrement costumés, exécutèrent pendant longtemps une musique bruyante et sauvage pour appeler au spectacle les habitants de la contrée. Quand tout le monde fut réuni et rangé en cercle autour de la scène, le Dhéba de Midchoukoung vint solennellement offrir à nos deux conducteurs et à nous, une écharpe de félicité, et nous invita à aller prendre place sur quatre épais coussins qu'on avait disposés au pied d'un grand arbre qui s'élevait à un angle de la cour. Aussitôt que nous nous fûmes assis, toute la troupe des saltimbanques se mit eu mouvement, et exécuta au son de la musique une sorte de ronde satanique, dont la rapidité fut sur le point de nous donner le vertige. Ensuite il y eut des sauts, des gambades, des pirouettes, des tours de force, et des combats avec des sabres de bois : tout cela était accompagné tour à tour de chants, de dialogues, de musique, et de clameurs imitant les cris des bêtes féroces. Parmi cette troupe de comédiens