Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/379

Cette page n’a pas encore été corrigée

désordre et une confusion inexprimables. Les Lamas parcourent les rues par bandes désordonnées, poussent des cris affreux, chantent des prières, se heurtent, se querellent, et quelquefois se livrent, à grands coups de poings, des batailles sanglantes.

Quoique les Lamas montrent, en général, peu de réserve et de modestie, pendant ces jours de fête, il ne faudrait pas croire cependant qu'ils se rendent a Lha-Ssa pour se livrer à des divertissements profanes, et peu conformes à leur état de religieux ; c'est la dévotion, au contraire, qui est le grand mobile de leur voyage. Leur but est d'implorer la bénédiction du Talé-Lama, et de faire un pèlerinage au célèbre couvent bouddhique appelé Morou, et qui occupe le centre de la ville. C'est de là qu'est venu le nom da Lha-Ssa-Morou, qui a été donné à ces six jours de fête.

Le couvent de Morou est remarquable par le luxe et les richesses qui sont étalés dans ses temples. L'ordre et la propreté qui y règnent continuellement, en font comme le modèle et la règle des autres couvents de la province. A l'ouest du principal temple, on voit un vaste jardin entouré d'un péristyle. C'est là que se trouvent les ateliers de typographie. De nombreux ouvriers, appartenant à la lamaserie, sont journellement occupés à graver des planches et à imprimer les livres bouddhiques. Les procédés dont ils se servent étant semblables à ceux des Chinois, qui sont suffisamment connus, nous nous dispenserons d'en parler. Les Lamas qui se rendent annuellement à la fête du Lha-Ssa-Morou, ont l'habitude de profiter de cette occasion pour faire leurs emplettes de livres.